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AC 206

par Erynna

Quatrième partie

Une fois n'était pas coutume, le punch était délicieux. Le dosage entre le rhum et le sirop de canne était parfait, et les fruits choisis s'harmonisaient avec une délicatesse qui charmait les papilles. Quatre, habitué aux soirées mondaines, appréciait en connaissance de cause. Portant le verre à ses lèvres, il laissa le doux liquide envahir sa bouche, le roula un long moment sous sa langue et finit par l'avaler. Il adorait sentir ces petites étincelles brûlantes traverser son corps et lui donner des frissons… La prudence était cependant de mise. En effet, Quatre Raberba Winner ne tenait pas du tout l'alcool.
Et le petit clown tatoué sur son postérieur était là pour le lui rappeler à chaque seconde. Un jour, il faudrait vraiment qu'il parle à ses sœurs et leur demande des explications sur ce soi-disant mémorable réveillon de 204.
Levant les yeux, il aperçut une silhouette hélas familière venir dans sa direction. Eberhardt Dreyer, illustre ambassadeur de la colonie L25. Deux mètres huit de vulgarité et de bêtise dans un monde de finasserie politique. Pourquoi fallait-il que la Winner Corp. jouât les fournisseurs officiels de satellites auprès de toute la Confédération ?
Le jeune homme opta pour un repli stratégique. Remerciant Allah de l'avoir pourvu d'une taille petite et mince, il se glissa entre les groupes d'invités et gagna le buffet. Une griffe acérée s'abattit sur son bras.
- Vous nous fuyez déjà, M. Winner ?
Voix grave, légèrement rauque et teintée de cynisme.
Relena.
- Bonsoir, Votre Excellence, répliqua-t-il en esquissant une courbette.
La jeune femme éclata de rire.
- Quatre, Quatre, même lorsque vous vous essayez à l'ironie, vous ne pouvez vous empêcher d'être adorable ! Oh et à propos, rougir comme une pucelle n'arrangera en rien votre cas.
- Et vous, Relena-sama, d'où vous vient cet humour grinçant ? répliqua-t-il en imitant le ton de la ministre.
Relena se pencha vers lui d'un air conspirateur.
- Vous voulez vraiment savoir ? dit-elle tout bas. Vous avez vu la pile de dossiers qui s'accumule chaque matin sur mon bureau ?
- Estimez-vous heureuse de ne pas avoir à gérer une entreprise dont les annexes sont disséminées à travers la galaxie !
Quatre ne savait plus très bien qui avait commencé ce petit jeu. En tout cas, l'échange rituel de plaisanteries avait étrangement rapproché l'homme d'affaires et la diplomate, créant entre eux un attachement auquel ni l'un ni l'autre n'aurait cru dix ans auparavant.
- Bonsoir monsieur Winner, dit la voix claire et solennelle d'un petit garçon.
Odin Darlian-Peacecraft était vêtu comme un prince et en avait certainement les manières. Tout en lui rendant son salut, Quatre songea qu'il n'avait jamais rencontré d'enfant comme Odin. Ce n'était pourtant pas l'expérience qui lui manquait. Vingt-neuf sœurs. Toutes mariées. Toutes mères de famille. Les goûters d'anniversaire se succédaient à un rythme affolant !
Odin était sage et silencieux. Un peu trop parfois, comme s'il n'appartenait pas à l'âge qui était le sien. Relena lui avait un jour confié son inquiétude à ce sujet, et vivait dans la crainte de ne pas être la mère aimante et disponible qu'elle désirait pour son fils. Sage, silencieux, solitaire… Il y avait décidément quelque chose de "yuyien" chez Odin, comme si Relena avait projeté l'image de son amour de jeunesse sur l'enfant à naître. Est-ce que c'était possible ? Quatre avait entendu parler de la terrifiante histoire d'une femme ayant rêvé d'un éléphant, et accouchant d'un monstre.
Un vague remue-ménage à l'entrée attira leur attention. Trois des anciens pilotes venaient de faire leur apparition. La jeune femme à ses côtés se raidit. Malgré ses airs moqueurs et blasés, Relena était nerveuse tandis qu'elle se préparait à faire face à Duo, Wufei et Trowa.
- Hi Q-man ! lança l'Américain d'un ton joyeux. Quelle fête ! Et… quel buffet !!!
Duo se précipita vers les amuse-gueule, suivi d'un Purdy dont le seul effort vestimentaire consistait à rentrer sa chemise dans son pantalon.
- Le jour où ce baka saura se comporter convenablement, les cochons voleront, maugréa Wufei en guise d'excuse. Bonsoir Winner. Madame, ajouta-t-il en s'inclinant vers Relena.
Celle-ci laissa l'ombre d'un sourire flotter sur ses lèvres minces. Quatre, qui n'avait pas sa maîtrise, pouffa de rire. Son ami n'avait tout simplement pas reconnu l'ex-Reine du Monde !
- Wufei, c'est Relena ! s'exclama le jeune homme.
- Je suis ravie de vous revoir Chang, renchérit la ministre en souriant. Allons, récupérez votre mâchoire, elle traîne par terre.
- Naaaaan !!! s'écria Duo qui s'était enfin arraché à la dégustation des petits fours. Vous ne POUVEZ pas être Relena Peacecraft !
- Chiche Maxwell, répliqua-t-elle du tac au tac. Dommage que vous ne puissiez plus parier votre natte, cela aurait été TRES intéressant.
L'Américain la fixa d'un air incrédule, médusé, sidéré…
Peacecraft, un. Maxwell, zéro.
- Oui eh bien… Content de vous voir, Relena-sama, marmonna Duo une fois qu'il eut recouvert l'usage de la parole.
- Vraiment ? Je me souviens d'un temps où vous me surnommiez Pissecraft, contre-attaqua Relena, bien décidée à s'amuser, peut-être même à se venger de toutes les crasses made in Shinigami qu'elle avait subies.
- Bah, je donne des petits noms à tout le monde… pas vrai, Wuffie ? répondit le jeune homme.
- M'appelle pas comme ça, rétorqua immédiatement le Chinois.
Les silences étonnés de Duo Maxwell ne duraient jamais bien longtemps.
- Heero n'est pas là ? demanda-t-il d'un ton faussement désinvolte.
- Sa navette a pris du retard, dit Relena en grimaçant un sourire, pas dupe. Il devrait arriver d'un instant à l'autre… Oh Chang, ne me dites pas que ce sont vos filles !
Quatre entendit à peine ses amis gâtifier devant leurs progénitures. Un sourire timide effleura ses lèvres lorsque ses yeux rencontrèrent un profond regard émeraude.

Après avoir salué la compagnie d'un hochement de tête poli et gratifié Relena d'un galant baisemain, Trowa s'était sensiblement éloigné du groupe. Le dos appuyé contre le marbre glacé d'une colonne et les bras croisés sur la poitrine, il les regardait rire et bavarder avec une apparente impassibilité.
// Je savais que je n'aurais pas dû venir… Je n'ai pas ma place dans ce genre de soirée. Et puis à quoi riment ces remerciements et ces hommages ? Nous avons fait ce que nous avions à faire. Heero ne viendra pas. S'il savait combien je l'envie ! Mon Dieu, je n'ai même pas de smoking… Je dois être le seul dans cette salle à ne pas porter de nœud papillon… Avec Purdy. Allons Barton, tu n'es pas désespéré au point de te comparer à ce type ! Seigneur, IL m'a vu… IL me sourit… IL vient vers moi… Pourquoi n'y a-t-il pas de système d'autodestruction lorsqu'on en a besoin ? Je me sens si misérable… //

Quatre cligna des paupières, étonné. Trowa Barton était la chose la plus incroyablement sexy qu'il eût jamais vue. Pantalon noir aux plis impeccables et blazer assorti s'accompagnaient d'une chemise de soie vert sombre qui rendait plus lumineuse encore la couleur de ses yeux.
* Misérable ? Trowa-kun, quelque chose ne va pas ? Argh, pourquoi mon uchuu no kokoro n'a-t-il pas été livré avec un décodeur ? Tu sembles si contrarié. Serait-ce à cause… de moi ? *

Le grand jeune homme brun se redressa nerveusement comme Quatre s'approchait de lui et demeurait à ses côtés sans mot dire. L'héritier était entièrement vêtu de blanc, à l'exception d'un fin ruban noir noué autour de son col. L'ensemble, d'une étonnante simplicité, lui allait à la perfection.
// Il a l'air d'un ange… Oh, c'est si stupide de dire ça ! Tout le monde ne cessait de le lui répéter. Ça l'ennuyait tellement. Je ne vais pas m'y mettre… Une telle pureté, une si grande innocence émane de lui… Et sa chevelure blonde semble briller comme une auréole… Suffit Barton, on ne pense pas aux anges de CETTE manière ! Dieu merci, j'ai pensé à mettre un pantalon ample… //

* Heureusement que j'ai mis un pantalon ample… Ça ne devrait pas être permis d'être aussi sexy ! D'accord, même avec un sac en papier sur la tête il serait sexy… Quatre, tu es un vrai malade. Huit ans que tu ne l'as pas vu et la première chose à laquelle tu penses en le retrouvant, c'est ÇA ! Tiens, mon verre est vide. *

// Je ne bois jamais d'alcool. Pourquoi en boirais-je alors que je peux boire ton âme à travers tes yeux… Ooooh, arrête ça tout de suite ! Mais… Quatre, que fais-tu ? A combien de verres en es-tu ? Souviens-toi que l'alcool et toi ne faites pas bon ménage ! //

* Ce n'est que le deuxième… Et je sens que je vais en avoir vraiment besoin, ce soir ! Je ferai attention, promis. Mmmmh, ce punch est un régal. Trowa, pourquoi ne te sers-tu pas ? C'est vrai, tu ne bois jamais. Toujours garder les idées claires, n'est-ce pas ? Ah, tu as sûrement raison. Si j'avais suivi ton exemple, je n'en serais probablement pas là. Quelle importance, tu ne te souviens sans doute pas de cette nuit-là. *

// Est-il possible qu'il ait oublié cette nuit-là ? Quant à moi, elle restera certainement gravée dans ma mémoire jusqu'à la fin de mes jours… //

* Je ne pourrai jamais oublier ce que j'ai fait ! Aujourd'hui encore, je ne cesse d'y penser… Tellement honte…*

// J'ai tellement honte… Comment ai-je pu réagir d'une façon aussi stupide ? Je suis impardonnable. //

* Je m'en veux terriblement. J'ai agi comme un imbécile, je me suis ridiculisé devant ses yeux. Allah, fais qu'il ne se souvienne plus ! *

// C'est mieux qu'il ne se rappelle pas… Oui, avec un peu de chance, il aura oublié et ne m'en voudra pas. Quatre, tu m'as tant manqué. //

* Tu me manques tellement, Trowa ! Je voudrais que tu le saches… *

// J'aimerais tant te le dire… //

* Trowa, je… *

// Quatre, je… //

- Belle soirée, murmura platement le jeune Arabe.
- …, acquiesça Trowa.

* * *

Heero ferma brièvement les yeux en pénétrant dans l'immense salle. La lumière coulait des lustres en vagues si étincelantes qu'elle paraissait irréelle. Le brouhaha des conversations, le cliquetis cristallin des verres parvenaient confusément à ses oreilles. Il se sentait vaguement nauséeux et les paumes de ses mains étaient moites. Se pouvait-il qu'il fût… nerveux ? Impossible, le Soldat Parfait Heero Yuy ne ressentait pas ce genre d'émotions !
D'un autre côté, il n'était plus le Soldat Parfait. Il était juste Heero Yuy, modeste employé d'une boîte informatique. Et le tract qu'il éprouvait était si intense qu'il n'avait qu'une envie : prendre ses jambes à son cou et courir très loin de là.
Il aperçut soudain un groupe familier et sentit sa gorge se nouer.
Tout se passera bien, Yuy. Tu avances vers eux, tu les salues, prends de leurs nouvelles et réponds à leurs questions.
Heero poussa un petit soupir désespéré.
Je n'y arriverai jamais !

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