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AC 206

par Erynna

Douzième partie

Le mercredi 26 avril de l'année 206 après colonisation, à 18 heures 37 minutes et 42 secondes, vit le moment précis où, pour Heero Yuy, la Terre s'arrêta de tourner.
- Heero, j'ai quelque chose de très important à te dire, déclara Relena alors qu'ils étaient tous réunis dans l'un des nombreux salons de l'ambassade.
La diplomate l'invita à le suivre d'un hochement de tête, et tous deux s'éloignèrent sous les regards curieux de leurs amis. Heero fit taire son instinct qui lui hurlait qu'une énorme tuile allait lui tomber sur le coin de la figure et masqua de son mieux la nervosité qui ne cessait d'augmenter au fur et à mesure qu'ils avançaient dans les couloirs. Relena ouvrit finalement la porte de son bureau et la referma aussitôt qu'il fut entré.
Heero balaya brièvement la pièce du regard, notant avec satisfaction la décoration sobre et fonctionnelle, les livres et les dossiers rangés avec un soin méticuleux sur les étagères et l'installation informatique hors de prix. Il ne put cependant réprimer un frisson en apercevant dans un coin retiré la petite poupée vaudou à l'effigie de Duo Maxwell, les membres encore percés de dizaines d'aiguilles. Durant la guerre, l'antagonisme entre les deux adolescents avait été quasi légendaire. Pourquoi ? Peut-être parce que seul Duo avait montré assez de cran pour dire ses quatre vérités à la demoiselle… Heero se félicita intérieurement de s'en être tenu à ses "omae o korosu".
- Je t'en prie, assieds-toi, dit Relena en prenant place derrière l'imposant bureau d'acajou.
Le Japonais se laissa tomber sur son siège sans quitter la ministre des yeux. Relena semblait au moins aussi nerveuse que lui, bien que sa maîtrise de soi permît à Heero de n'en rien montrer. Il contempla avec fascination les longs doigts de la jeune femme se croiser et se décroiser jusqu'à ce que, à bout de patience, Relena se levât et fît les cent pas à travers la pièce.
Il avait toujours un peu de mal à croire que l'insipide gamine qui lui avait couru après, dix ans plus tôt, était devenue cette femme volontaire, rusée et presque cynique. Heero s'était surpris à apprécier la manière dont Relena avait mené l'assaut contre le FLC dès que les enfants étaient rentrés à bon port. Tandis que Lady Une et Noin avaient pris la tête des recherches, Sally et elle avaient veillé à localiser les rebelles et à préparer une attaque dans les règles de l'art. Tout le monde s'était alors rendu compte à quel point Relena avait fait sienne la devise de Terminator : "Frappe d'abord, discute ensuite". En à peine cinq jours, le FLC était passé de la catégorie des menaces imminentes à celle des histoires anciennes. Quelle ironie du sort ; eux qui avaient passé leur jeunesse à combattre pour l'indépendance des colonies, se retrouvaient dix ans plus tard à lutter pour préserver l'alliance formée sous la tutelle terrestre…
Relena cessa brusquement de tourner en rond comme un lion dans sa cage et le regarda droit dans les yeux.
- Dis-moi Heero, te souviens-tu de cette série de tests que tu as passée peu avant la signature de l'armistice ? s'enquit-elle.
Heero acquiesça en silence, se demandant où diable la diplomate voulait en venir.
- Bien. Bien…
Relena commença à se ronger pensivement un ongle.
- Tu… tu te souviens peut-être également que… comment dire… tu as… donné… ton…. ton…
- Mon ? fit Heero, légèrement agacé.
- Sperme ! s'exclama-t-elle d'un ton brusque avant de se couvrir la bouche.
- Hn, affirma le jeune homme, de plus en plus perplexe. Et alors ? Les autres aussi, non ?
- Oui, c'est ça… murmura-t-elle sans avoir vraiment entendu les paroles de Heero.
Puis, ayant sans doute décidé qu'elle avait suffisamment tourné autour du pot…
- Heero, je n'irai pas par quatre chemins : Odin est ton fils.

Heero sortit du bureau et regagna le salon sans prononcer un mot, tout absorbé qu'il était à poser un pied devant l'autre comme s'il marchait sur un terrain miné. Il aperçut sans réellement les voir ses amis se lever à son arrivée. La voix de Quatre résonna quelque part jusqu'à son esprit, pleine d'inquiétude.
- Heero, quelque chose ne va pas ?
- Yuy ? appela doucement Wufei en faisant un pas vers lui.
- Hee-chan, tu n'as pas l'air dans ton assiette, mon gars ! fit Duo d'une voix assourdie.
Sa vision alors se brouilla et Heero Yuy, jadis pilote de Gundam et Soldat Parfait, tomba dans les pommes comme une dernière pensée se formait dans son esprit…
Kazuo va me tuer !

* * *

Epilogue

- Oho, on a opté pour le look camionneuse, ma Lulu ? se moqua Duo en laissant entrer ses invitées.
Lucrezia Noin avait revêtu pour l'occasion une paire de jeans retenue par un ceinturon de cuir et une large chemise de flanelle à gros carreaux bleus et blancs.
- Et monsieur se prend peut-être pour l'un des membres de Village People ? répliqua-t-elle en lui tendant une bouteille de champagne. Qu'en dit le Père la Pudeur ?
Duo lui lança un sourire malicieux et, se tournant légèrement, laissa la Preventer admirer son pantalon de cuir noir et son débardeur violet sombre.
- Le Père la Pudeur, comme tu l'appelles, a levé les yeux au ciel dès qu'il m'a vu ! J'en ai aussitôt déduit qu'il remerciait Nataku ou Dieu sait qui de m'avoir fait un corps aussi sublime !
- Dans tes rêves, mon mignon ! rigola Lucrezia.
- Gna gna gna… moi aussi j' t'adore, ma Lulu ! Sally, jolie robe !
- Bonsoir Duo, dit cette dernière.
Sally rajusta les plis de son vêtement, visiblement peu habituée à porter des atours aussi… féminins. Trébuchant sur les dernières marches avec ses talons hauts, elle lâcha un pittoresque juron.
- Voilà pourquoi je préfère les uniformes ! gronda-t-elle en lançant un regard assassin à la ronde. Si ce n'était pour mes filles… Où sont-elles ?
- Aux fourneaux avec Fei-chan, répondit Duo en l'observant d'un air amusé. En train de préparer des rouleaux de printemps.
- Miam la cuisine chinoise ! chuchota Noin à son oreille.
- Miam miam ! renchérit Duo en prenant son amie par le bras.

Wufei, assis en équilibre sur l'accoudoir du fauteuil occupé par Duo, plongea la main dans le bol de crackers que tenait l'Américain avant de promener son regard sur les invités de la petite fête qu'ils avaient organisée pour leurs retrouvailles. Noin furetait dans la collection de disques de Duo, impressionnante par son éclectisme : Mozart y côtoyait Muse, Dir en Grey et Billie Holiday en un joyeux voisinage. Sally, accroupie sur l'épais tapis de laine férocement négocié dans l'un des célèbres marchés de la capitale de L2, s'amusait avec les jumelles, les yeux brillants d'une infinie tendresse. Quatre et Trowa, à moitié allongés sur le sofa, se nourrissaient mutuellement de biscuits au fromage… Depuis leur "sortie de prison", les deux époux ne s'étaient plus quittés d'une semelle. En fait, c'était à peine s'ils faisaient attention au reste du monde. Certes, ils étaient adorables à toujours se tenir la main, s'enlacer n'importe où et s'embrasser toutes les trois secondes… mais au bout d'un moment, ces démonstrations d'affection devenaient lassantes. Surtout si l'on était soi-même un malheureux célibataire au cœur brisé, pensa Wufei en exagérant juste un petit peu.
Après tout, il n'était pas si solitaire que cela. Penchant la tête, il rencontra un regard améthyste plein de douceur.
- Tu peux les finir, si tu veux, murmura Duo en lui tendant le bol de crackers.
- Le mythique appétit du Shinigami serait-il finalement contenté ? ironisa le Chinois en prenant le plat pour le poser sur la table basse.
- Je me réserve pour le délicieux dîner que tu nous as préparés, Wu-chan !
Ignorant le surnom, Wufei laissa un sourire planer sur ses lèvres. Vivre avec Duo Maxwell n'était pas si désagréable. Se félicitant une fois de plus d'avoir accepté la proposition de l'Américain, le jeune homme se souvint des circonstances qui l'avaient poussé à faire ce choix… Le vol de sa voiture abandonnée sur le bord du chemin, le refus de l'assurance de le rembourser, le fisc lui tombant sur le dos à cause des innombrables dettes qu'il avait accumulées pour ouvrir son dojo… La pension alimentaire que devait lui verser Sally n'aurait pas même suffi à couvrir la somme due. Il avait obtenu d'un commun accord la garde de Mei et Ling, en partie à cause de la carrière prenante de Sally. Et puis la jeune femme s'était plue à reconnaître que l'instinct maternel de Wufei était bien plus développé que le sien. Résultat : l'ancien pilote de Shenlong s'était retrouvé à la rue avec deux gamines sur les bras et aucun endroit où aller. Et pas question de jouer les pique-assiettes chez son ex-femme et l'amante de celle-ci ! Voilà qui aurait été par trop déshonorant…
- Viens habiter chez moi ! avait alors proposé Duo avec son enthousiasme coutumier.
- Je ne sais pas si…
- T'inquiète, c'est pas pour toi que je le fais, Wu… mais pour tes amours de bouts de chou !
Impossible de dire non. Cela n'aurait d'ailleurs servi à rien ; d'une manière ou d'une autre, Duo Maxwell obtenait toujours ce qu'il voulait.
Finalement, la grande maison de style victorien n'était pas déplaisante, elle non plus. Tout était une question de point de vue, songea-t-il en souriant de plus belle. Bien sûr, les murs extérieurs auraient besoin d'un sacré coup de pinceau, la tapisserie était à refaire, il fallait traiter les parquets de bois et les poutres, remplacer toute la tuyauterie, ramoner les cheminées et revoir l'installation électrique toute entière, mais avec un peu de patience… et d'argent… Wufei remercia secrètement Duo de lui avoir trouvé un emploi dans son orphelinat, histoire de lui faire sentir qu'il n'était pas complètement à la charge de son ami. De tous les ex-pilotes, Wufei n'aurait jamais cru que sous ses airs de clown, Duo serait celui qui le comprendrait le mieux.
La sonnette retentit soudain, coupant le vagabondage de ses pensées. Probablement Heero, accompagné d'Odin et de son mystérieux compagnon.
- J'y vais ! s'écria l'Américain en bondissant de son fauteuil comme un diable hors de sa boîte.
Heero avait refusé de dire quoi que ce fût au sujet de son amant, avouant seulement et presque à regret qu'il s'agissait d'un homme du nom de Kazuo. Après quoi, motus et bouche cousue. Le Japonais était la pire tête de mule qu'il eût jamais connue.
La curiosité l'emportant, Wufei se leva à son tour et rejoignit Duo, guidé au son du joyeux accueil que prodiguait le Shinigami à ses hôtes.
- Hee-chan, content que tu aies pu venir ! Nan, Une et Relena n'ont pas pu se libérer… En revanche, les Barton-Winner s'en donnent à cœur joie sur le canapé, tu devrais voir ça !! Oh, un gâteau, fallait pas te donner ce mal… je plaisante, merci beaucoup de la part de mon estomac !!! Hey Odin, comment ça va bonhomme ? Ma parole, tu as grandi depuis une semaine ou c'est moi qui rétrécis ? Et je suppose que c'est Kazuo qui arrive ! Bienve…
Wufei fronça les sourcils, étonné du silence brutal qui venait de tomber. Accélérant le pas, il passa dans le vestibule et s'arrêta derrière l'Américain.
- Qu'est-ce que…
Le Chinois ouvrit de grands yeux en voyant le jeune homme qui se tenait près de Heero, l'air gêné. Sa silhouette dominait largement celle de son compagnon. De longs cheveux blond platine tombaient sur ses épaules et dans son dos, des mèches plus courtes effleurant son visage aux traits fins et aristocratiques, et ses yeux d'un bleu acier se plissaient légèrement d'embarras.
- Par Nataku c'est… c'est… balbutia Wufei.
- C'est… c'est… fit Duo en écho.
- ZECHS MERQUISE !!! hurlèrent derrière eux quatre voix familières.
Heero haussa les épaules.
- Tu comprends maintenant pourquoi je ne voulais pas que tu viennes ? murmura-t-il à Kazuo.

Le dessert venait de faire son apparition sur la table et Duo n'avait toujours pas quitté des yeux un Kazuo plus troublé que jamais.
- Baka, laissa tomber Heero en coupant une part de gâteau pour Odin.
- J'y peux rien ! protesta Duo en fronçant les sourcils. Un Japonais avec des yeux bleus, d'accord ! fit-il en hochant la tête vers son ami. Mais avec des cheveux blonds !!
- Ma mère est suédoise, expliqua pour la énième fois Kazuo d'un ton las.
- Mais enfin, je suis le seul à le voir ou quoi ? s'écria l'Américain en l'ignorant.
- Bien sûr que non, Duo. Mais contrairement à toi, nous avons la politesse de ne pas le fixer comme une bête curieuse, dit Wufei en rattachant sa serviette au cou de Ling.
- Merci, Wufei. Vos paroles me sont d'un tel réconfort… soupira Kazuo sans en croire un seul mot.
Le Chinois vira à l'écarlate.
- Temps mort !! réclama Duo d'une voix forte. Je rêve ou il vient de m'appeler par mon prénom ?!
Tout le monde se tourna vers Wufei, dont le visage atteignit des nuances de rouge insoupçonnées.
- Quand même, une telle ressemblance est incroyable, considéra Lucrezia d'un air songeur.
- J'ai vraiment cru voir un fantôme, daigna remarquer Quatre avant de tendre sa cuillère à Trowa, qui avala docilement la crème et le chocolat.
- En tout cas, voilà qui confirme la théorie des sosies parfaits, dit Sally en guise de conclusion au sujet.
Kazuo jeta un regard désespéré en direction de Heero. Ce dernier lui fit sa petite moue qui signifiait "je te l'avais bien dit !" et piqua une cerise confite pour la donner à son fils.
- Moi aussi je veux une cerise ! fit Mei d'un ton suppliant.
- Tu en as déjà eu deux, ma grande, répondit Wufei. Laisse leur part aux autres.
- Mais… gémit Mei en lui lançant un regard de petit chiot perdu.
- Tiens Mei-chan, je te laisse la mienne, offrit Duo en souriant.
- Duo, inutile de la gâter, avertit Wufei.
- Ha ! Tu m'as encore appelé Duo ! s'exclama l'Américain. Deux fois en une journée, c'est un miracle !
- Si tu pouvais en faire autant et m'appeler Wufei…
- Et manquer une occasion de t'enquiquiner ? Ce serait un crime !
Kazuo se rabattit tout à coup vers Heero, horriblement gêné. Quatre et Trowa, assis à sa droite, venaient de se jeter l'un sur l'autre et s'embrassaient avec passion…
- Ils sont toujours comme ça ? demanda-t-il à voix basse.
- Hn… souffla Heero, fataliste.
En son for intérieur, l'ex-pilote de Wing ne pouvait s'empêcher d'envier le manque total de pudeur de ses amis. S'il avait n'était-ce qu'un instant le courage de prendre la main de Kazuo… Il en avait envie, là n'était pas la question. Etait-il alors paniqué à l'idée de ce qu'on pourrait penser de lui ? Même pas… quel était son problème ? Ou peut-être… voulait-il garder les moments qu'il passait avec Kazuo pour lui tout seul, sans autre témoin que les murs de leur chambre ? A moins qu'il ne fût un sombre imbécile qui réfléchissait trop au lieu d'agir.
Kazuo haussa un sourcil en sentant la main rugueuse de Heero se poser sur la sienne. Tournant la tête, il interrogea son amant du regard.
Ai shiteru…
Les mots furent à peine ébauchés et ne semblèrent jamais qu'un silence de plus entre les deux hommes. Ce fut néanmoins suffisant et Kazuo, répétant le geste de Heero, bougea les lèvres sans qu'aucun son n'en sortît.
Ils se sourirent, heureux.
- Cela fait longtemps que j'y pense… faisait Wufei. Quel est le rapport entre la perte de ta natte et les crêpes Suzette ?
- Oh… Ce n'est pas une histoire très intéressante, commença Duo en riant nerveusement.
- Je suis sûre que si, répliqua Lucrezia avec un sourire narquois.
- Oui Duo, raconte-nous comment c'est arrivé, ironisa Wufei.
- Vous tenez vraiment à savoir ? Oui ? Le contraire m'aurait étonné… Toujours à vous repaître du malheur d'autrui, pas vrai ? Alors voilà, j'avais décidé de faire flamber des crêpes quand soudain…

~Fin~

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