Gundam Wing Fan Fiction ❯ Prince de mes rêves ❯ Chapter 7

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Prince de mes rêves

par Erynna

7. Celui que berçaient les vagues...

- Tu as le droit de m'en vouloir.
- Pourquoi t'en voudrais-je ? Ce n'est pas ta faute.
- Quand même... ça doit être le pire rencard de ta vie.
- Non, voyons ! Et puis, je n'en ai pas eu tant que ça.
- Tu te fiches de moi.
- Non...
Le jeune homme pencha la tête en souriant, laissant un rideau de fins cheveux noirs glisser sur son épaule.
Merveilleux... songea Heero, et il en oublia de boire le verre d'apéritif qu'il avait approché de ses lèvres.
Pourquoi se sentait-il inéluctablement attiré par ce garçon ? Il y en avait de plus beaux, de plus aguicheurs, de plus faciles à séduire. S'il cherchait une aventure d'un soir, eh bien, il avait déjà obtenu ce qu'il désirait. Alors pourquoi insister avec celui-là ?
- Ce restaurant est très agréable, reprit Wufei en laissant son regard errer sur les alentours.
- Ma sœur me l'a fait découvrir. Pour une fois qu'elle sert à autre chose que me pourrir la vie...
- L'onna qui était dans le salon, la première fois, puis au commissariat... fit le Chinois avant de baisser les yeux, incapable de réprimer sa rougeur.
Heero remercia silencieusement Lucrezia de l'avoir traîné jusqu'à ce petit restaurant situé dans une ruelle près du vieux port. Le décor ne payait pas de mine ; le bois massif des poutres et les murs blanchis à la chaux supportaient divers ornements rappelant la mer, ses attraits et ses dangers. L'ensemble faisait très carte postale, mais possédait une convivialité et une qualité culinaire qu'il avait rarement rencontrées ailleurs.
- Ça te fait mal ? demanda soudain Wufei.
Il le regarda bêtement, surpris de sa question.
- Quoi donc ?
- Je parle de cette horrible griffure sur ton visage, expliqua l'autre.
Wufei tendit le bras vers lui et de ses doigts effleura les marques rouges traversant sa joue droite.
- Ah ça... Non, je ne sens rien.
Il saisit le délicat poignet lorsque Wufei fit mine de retourner à sa place, puis le laissa filer entre ses doigts en une fugitive caresse.
- Que s'est-il vraiment passé au supermarché ? Je t'ai attendu pendant des heures et quand tu es finalement arrivé, tu avais l'air de t'être battu...
- Je me suis battu.
- Pardon ?!
- Avec une cinglée qui refusait de me laisser la bière de ma sœur. Crois-moi, tu ne préfères pas savoir de quoi Lu est capable quand elle n'a pas sa dose quotidienne.
Wufei laissa échapper un petit rire.
- Toi, tu aimes ta sœur !
- Cette furie ? Aucune chance.
Il sourit cependant, moins à cause du sujet de conversation que du rire du jeune homme.
Pourquoi est-ce que je me sens de plus en plus attaché à lui ? Je ne connais rien de lui, à peine son nom. J'ignore ce qu'il aime, ce qu'il déteste, son métier s'il en a un, son passé m'est inconnu. Et pourtant...
Et pourtant, il savait déjà qu'il ne pourrait plus vivre sans entendre ce rire rauque et doux-amer. Il voulait se réveiller le matin et voir ce visage tourné vers lui, reposant sur l'oreiller, et le soir se coucher en tenant ce corps entre ses bras, avoir pour dernière image ces yeux bruns aux profondeurs insondables qui ne brilleraient que pour lui, que pour lui...
Je l'aime.
Les mots, très simples, se formèrent dans son esprit.
Et ce fut comme une libération.
- C'est délicieux, remarqua Wufei, les yeux plongés dans le liquide ambré qui oscillait dans son verre. Qu'est-ce que c'est ?
- De l'hypocras. C'est un vin épicé et sucré.
- Mmm... oui, je peux déceler le goût de la cannelle... et aussi un brin de girofle, fit-il en sirotant pensivement le breuvage. Quoi d'autre ?
- De la vanille.
- C'est ça ! Vraiment délicieux... Mais peut-être ne devrais-je pas trop en boire, ajouta-t-il avec un petit rire gêné.
Heero allait ajouter quelque chose lorsque le serveur apporta les hors-d'œuvre.

* * *

Il picorait distraitement la salade dans son assiette, n'osant lever la tête de peur de rencontrer les yeux de son interlocuteur, sombres et tumultueux comme une mer d'orage.
Tant de choses passaient à travers un simple regard, tant d'émotions et de sentiments si divers. C'en était presque effrayant.
Il se souvenait du premier regard de Heero. Sa couleur intrigante, son assurance mêlée à l'incertitude de ses propres réactions et cette envie quasi douloureuse de le mettre à nu... pas seulement au sens physique, mais le dépouiller de sa chair pour atteindre son âme.
Et puis le deuxième, le lendemain. Hésitant, nostalgique, comme regrettant la brièveté pourtant prévisible de leur union. Aurait-il voulu que Wufei demeurât près de lui ?
Non, c'était totalement stupide ! Heero avait juste voulu un amusement d'une nuit... ou bien autre chose ? L'espoir d'une relation avec le jeune homme aux yeux bleus était-il si fou qu'il en avait l'air ? Après tout, les voilà qui se retrouvaient presque en tête-en-tête à un dîner d'amoureux...
C'était étrange, cette sensation de ne plus savoir quoi penser, de se sentir au bord d'un gouffre mais d'être prêt à sauter si l'autre vous accompagnait dans votre chute. Si seulement...
Non. Ne pas penser à lui...
- Tu n'aimes pas ? s'enquit Heero, légèrement soucieux.
- Mm ? Oh si, c'est très bon !
- Alors pourquoi tu ne manges pas ?
- Mais je mange ! s'indigna Wufei, amusé malgré tout. Seigneur, j'ignorais que tu étais une mère poule.
A ces mots, Heero manqua s'étrangler et s'effondra sur son assiette, terrassé par une toux de tuberculeux jusqu'à ce que Wufei, charitable, lui servît un grand verre d'eau.
Heero le remercia entre deux gorgées.
- Personne n'avait jamais osé me traiter de mère poule, fit-il remarquer d'un ton noir. Tu as de la chance qu'on sorte ensemble.
Wufei en laissa tomber sa fourchette.
- On... on sort ensemble ? balbutia-t-il, stupéfait.
Les yeux bleus se posèrent sur lui, le sondant de leur lueur de vague tristesse.
- Ce n'est pas comme ça que tu voyais notre rendez-vous ?
- Je... si mais... L'entendre dire...
Un sourire éclaira ses traits fins.
- Ensemble... j'aime assez, dit-il platement, à court de mots.
Heero se renversa sur sa chaise et, reposant ses couverts, se mit à l'observer sans vergogne.
- Pourquoi réagis-tu comme ça ? Ça te fait peur ?
Un sourcil noir se haussa.
- Peur ? Moi ? Ne te moque pas de moi ! rétorqua Wufei avec un reniflement de mépris. Non, je n'ai pas peur. Je suis juste... étonné...
- Je peux savoir ce qui t'étonne tant ?
- Tu poses beaucoup de questions, répliqua-t-il. Moi qui te prenais pour le genre silencieux...
- J'ai juste envie de te connaître un peu mieux, répondit Heero, sincère. Alors ?
Wufei haussa les épaules, brusquement conscient que le Japonais ne lâcherait pas le morceau.
Il détestait cette introspection forcée dans ses sentiments. Plus encore, il détestait leur totale confusion. Il aurait voulu voir la soirée s'écouler tranquillement, ne pas avoir à répondre aux questions de Heero sur ses incertitudes et son stress...
Ah... bien sûr que j'ai peur ! Peur de ne pas te plaire, peur de te décevoir, peur de me montrer sous mon plus mauvais jour, peur que tu me détestes et ne veuilles plus jamais me revoir, peur de ne pas voir mes sentiments partagés...
Sa dernière pensée éveilla une flatteuse rougeur sur ses joues.
- Je suis peut-être un peu nerveux, avoua-t-il finalement. Cela fait longtemps que je n'ai pas eu à subir l'épreuve du premier rendez-vous... J'ai dû perdre l'habitude !
- Premier rendez-vous... pas vraiment, dit paisiblement Heero. Disons que le tout premier ne nous a pas laissé le temps de bavarder.
Le rougissement du Chinois gagna en intensité.
- Ça, on peut dire que c'était bizarre... hésita Wufei en se trémoussant sur son siège.
- Tu n'as pas aimé ?
Ah, les questions de Heero, si pleines de tact et de délicatesse !
- Est-ce que j'ai le droit de ne pas répondre ? tenta-t-il.
- Tu n'as pas aimé, conclut l'autre en fronçant les sourcils.
- Non ! Je veux dire, si ! Aaargh, tu es désespérant ! éclata Wufei en se cachant le visage dans les mains. Pourquoi faut-il que tu interprètes les choses au sens littéral ?
- Parce que tu es très mignon quand tu es tout gêné.
Wufei releva la tête et jeta un regard suspicieux au jeune homme en face de lui.
- Tu te fiches de moi ? demanda-t-il d'un ton menaçant.
- Non, je ne me fiche pas de toi, loin de là, répondit Heero avec un sourire tordu. Seulement, tu agis depuis le début de la soirée avec si peu de naturel que je me demande où est passé le vrai Chang Wufei... Tu t'extasies sur le resto, la décoration, le contenu de ton verre, mais dès qu'on en vient aux choses véritablement personnelles ET intéressantes, tu te refermes aussitôt. J'ai vraiment envie qu'on apprenne à se connaître, Wufei.
Pour appuyer ce qu'il venait de dire, Heero se pencha vers lui et, prenant ses mains dans les siennes, se mit à le fixer intensément...
Et au diable les autres clients qui les observaient avec curiosité !
- Tu comprends ce que j'essaye de te dire ? termina le brun.
- Je crois... murmura Wufei, les yeux rivés sur ces mains chaudes qui refusaient de lâcher les siennes.
- Bien, dit Heero, un petit sourire satisfait aux lèvres. Alors, parle-moi de toi.
- Comme ça ? s'exclama Wufei, un peu désappointé de se voir privé des caresses sur ses mains.
- Pourquoi pas ? Mais si tu préfères que je commence... Je n'ai pas grand-chose à dire. J'ai vingt-cinq ans, je suis pompier et comme tu le sais déjà, je vis avec la sœur la plus chiante qui soit au monde. A ton tour.
- Eh bien... J'ai aussi vingt-cinq ans et... je suis écrivain.
- Ecrivain ? Tu as publié des bouquins connus ?
- Sans vouloir me vanter, j'ai un assez beau tableau de chasse.
Et Wufei, mis en confiance par un sujet qui lui tenait à cœur, se lança dans un exposé sans fin sur sa précieuse Nataku...
Kawaii... songea Heero, totalement oublieux du discours du Chinois et malgré tout un peu ennuyé que les seuls livres qu'il eût jamais ouverts fussent l'annuaire téléphonique et le manuel du parfait bricoleur (qui appartenait à Lu, d'ailleurs.)
Les pommettes rouges et les yeux brillants, Wufei parlait d'une voix à la fois douce et animée, aux accents rauques et néanmoins mélodieux. Quelque chose disait à Heero que ce garçon serait plus difficile à cerner qu'il y paraissait. Et le challenge ne l'en séduisait que plus.
Et moi, voudra-t-il me connaître ?
C'était l'éternelle question qui trottait dans sa tête. Etait-il assez beau, assez intéressant pour retenir l'attention de Wufei ? Inutile de chercher à se comparer à son ancien amant... quel était son nom déjà ? Ah oui, Khushrenada... le soi-disant éditeur. Ses doigts s'égarèrent dans son épaisse chevelure brune. S'il allait par là, jamais il ne réussirait. Mieux valait concentrer ses efforts sur ce qui était important, n'est-ce pas ?
- ... et voilà comment j'ai terminé à poil au sommet de la Tour Eiffel, lui parvint la voix de Wufei, coupant brutalement court à ses pensées.
- Quoi ?!
- Tu ne m'écoutais pas, se moqua Wufei.
- Siiii...
- Et tu mens très mal, toi aussi. Ce n'est pas grave, mon meilleur ami lui-même dit que j'ai tendance à devenir soporifique quand je parle de Nataku.
- Soporifique, toi ? Non... beaucoup de mots me viennent à l'esprit quand je pense à toi, mais "soporifique" n'en fait certainement pas partie.
- Flatte-moi encore un peu et je viendrai te manger dans la main ! dit Wufei en riant.
- C'est une proposition ? demanda Heero, la tête penchée sur le côté.
- Peut-être... répliqua-t-il, conscient que le jeu prenait une certaine tournure.

* * *

Ils se promenaient sur l'avenue qui longeait la plage, baignés par la clarté argentée de la lune et autant silencieux l'un que l'autre. Seules les vagues faisaient entendre leur murmure incessant.
Milliers d'étoiles dans le ciel, mais la seule qui compte réellement se trouve près de vous...
Qui disait cela, déjà ?
Un philosophe, un ancien poète ?
Ou Duo, peut-être. Malgré ses pitreries et ses airs nonchalants, son ami sortait parfois les choses les plus belles et les plus sensées qu'il eût jamais entendues.
Wufei jeta un coup d'œil au jeune homme qui marchait près de lui, les mains dans les poches et regardant droit devant lui.
Je pourrais presque le toucher... glisser ma main dans la sienne et faire comme si... comme si tout était simple entre nous, songea-t-il en se mordant la lèvre. Oh, et puis au diable ma conscience !
- Descendons sur la plage ! lança-t-il en agrippant le bras de Heero, et il l'entraîna à sa suite.
Pris de court, Heero se laissa faire... et poussa un soupir de plaisir en sentant ses pieds s'enfoncer dans le sable, la main fine de son ami - amant ? - venant se lover dans la sienne.
Tant pis si mes chaussures de cuir sont foutues...
- Viens... viens... susurrait Wufei entre deux éclats de rire, heureux d'être avec lui, tout simplement.
Et disant cela, il reculait, se dérobait, puis revenait à la charge, tour à tour farouche et séducteur, inconscient de ses gestes... ou peut-être pas.
Heero parvint à saisir son poignet tandis que l'autre faisait mine de s'éloigner. Il l'enlaça tout contre lui, son visage à peine à quelques centimètres de celui de Wufei.
- Si tu tentes de m'allumer, c'est réussi, souffla-t-il.
- Est-ce que je tente... seulement ? chuchota Wufei, sa voix se perdant dans le roulement des vagues sur la grève.
Et, se penchant doucement, il frôla de ses lèvres celles de Heero.
- Allumeur... haleta ce dernier lorsqu'il sentit Wufei s'échapper à nouveau de son étreinte.
Il le laissa cependant aller, son regard rivé sur la silhouette gracieuse qui ne cessait de tournoyer autour de lui.
- J'ai bu à peine un verre et c'est comme si j'en avais bu dix ! s'exclama Wufei. Je ne suis pas soûl, ce soir, et pourtant... j'ai la tête légère, j'ai du mal à penser et j'ai l'impression de dire n'importe quoi ! Est-ce que... C'est toi, c'est toi qui me fais cet effet-là !
Brusquement, le jeune Chinois noua ses bras autour du cou de Heero et posa sa tête contre l'épaule qui s'offrait à lui.
- Tu me rends ivre, laissa-t-il échapper, s'abandonnant enfin à ces bras qui l'étreignaient, le chant de l'océan lui parvenant en arrière-fond.
- Et toi, ce que tu me fais... soupira Heero, incapable de continuer, envoûté par le parfum de la chevelure sombre, vanille et embruns se mêlant inextricablement.
Sa main vint caresser la courbe d'une mâchoire et, la levant avec d'infinies précautions, Heero embrassa la bouche qui se tendait vers lui, très tendrement.
Etait-ce juste un baiser ? Ou venaient-ils de sceller une promesse dont aucun ne connaissait encore les termes exacts ?
Peu importait... Le matin viendrait bientôt, effaçant tout ce que cette nuit parsemée d'étoiles et de vagues avait de spécial et en même temps, elle était destinée à ne jamais finir...

~Fin~

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